La fonction publique impose des obligations strictes en matière de déontologie, notamment en ce qui concerne les activités complémentaires et les engagements financiers. Pourtant, de nombreux agents publics s’interrogent sur la possibilité de prendre des parts dans une société à responsabilité limitée sans enfreindre les règles qui régissent leur statut. Cette question soulève des enjeux à la fois juridiques et éthiques, car il s’agit de concilier le respect des principes de probité et de neutralité avec la liberté d’entreprendre.
Les conditions légales pour devenir associé d’une SARL en tant que fonctionnaire
Un agent de la fonction publique peut effectivement détenir des parts sociales dans une SARL et percevoir des dividendes, à condition de ne pas exercer de rôle actif dans la gestion de la société. Cette distinction entre la simple détention de capital et l’exercice de fonctions dirigeantes est fondamentale. En tant qu’associé minoritaire, le fonctionnaire bénéficie d’une protection juridique renforcée et peut investir dans une entreprise sans transgresser les règles de cumul d’activités. Cependant, cette liberté n’est pas sans limites et doit s’inscrire dans un cadre précis pour éviter tout conflit d’intérêts.
Les autorisations préalables nécessaires auprès de l’administration
Avant de prendre des parts dans une société, tout fonctionnaire doit obtenir l’accord préalable de son administration. Cette démarche passe par une demande écrite adressée à l’autorité hiérarchique, qui doit fournir des informations détaillées sur la nature de l’activité envisagée, la durée de l’engagement et les modalités de rémunération. L’administration dispose d’un délai d’un mois pour répondre, et l’absence de réponse vaut refus. En cas de doute sérieux sur la compatibilité du projet avec les fonctions exercées, l’administration peut consulter le référent déontologue ou la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Cette procédure vise à prévenir toute situation susceptible de nuire à l’impartialité ou à l’intégrité du service public. La commission de déontologie joue un rôle central dans l’évaluation des demandes, en vérifiant que l’activité envisagée ne compromet ni les missions de l’agent ni l’image de l’administration. Selon Source : l-expert-comptable.com, un fonctionnaire doit notamment s’assurer que le temps consacré aux activités liées à la SARL ne dépasse pas dix-sept heures trente par semaine, afin de garantir la pleine disponibilité pour ses obligations professionnelles.
Les différences selon le statut du fonctionnaire et le type de société
Les règles applicables varient considérablement selon que l’agent occupe un emploi à temps complet ou à temps partiel. Un fonctionnaire travaillant à moins de soixante-dix pour cent du temps légal peut créer ou reprendre une entreprise sans limitation de durée, sous réserve de compatibilité avec ses obligations de service. En revanche, un agent à temps plein doit solliciter un passage à temps partiel pour exercer une activité de dirigeant, avec une durée maximale de trois ans renouvelable une fois pour un an. Les agents publics non titulaires de droit public disposent d’une plus grande souplesse et peuvent détenir librement des parts sociales. La SARL familiale constitue une option particulièrement intéressante pour les fonctionnaires souhaitant entreprendre avec leurs proches, car elle offre des avantages fiscaux spécifiques. Le taux d’imposition sur les bénéfices d’une société est de vingt-cinq pour cent en 2025, avec un taux réduit de quinze pour cent sur les premiers quarante-deux mille cinq cents euros de bénéfices sous conditions. Les plafonds de chiffre d’affaires en 2025 pour un auto-entrepreneur s’élèvent à cent quatre-vingt-huit mille sept cents euros pour les activités commerciales et soixante-dix-sept mille sept cents euros pour les prestations de services.
Les règles déontologiques à respecter pour éviter les conflits d’intérêts
Au-delà des autorisations administratives, le fonctionnaire associé d’une SARL doit veiller scrupuleusement à éviter tout conflit d’intérêts. Cette notion recouvre toute situation dans laquelle l’agent pourrait être amené à privilégier ses intérêts privés au détriment de l’intérêt général. Le respect de l’éthique de la fonction publique impose une vigilance constante, notamment lorsque l’activité de la société pourrait interférer avec les missions exercées par l’agent. Toute activité lucrative après la fonction publique doit être contrôlée par l’administration pour vérifier sa compatibilité avec les fonctions exercées pendant les trois années précédentes. Cette obligation vise à prévenir les phénomènes de pantouflage et à garantir l’impartialité des décisions publiques.
L’interdiction de cumul d’activités et les exceptions possibles
En principe, un fonctionnaire à temps plein ne peut pas diriger une société à but lucratif, mais plusieurs dérogations existent. Les activités artistiques ou de création, telles que la publication de livres, la réalisation d’œuvres musicales ou dramatiques, ainsi que les conférences, sont librement autorisées sans démarche auprès de l’administration. De même, les fonctions d’agent recenseur, les contrats vendanges d’une durée maximale d’un mois renouvelable jusqu’à deux mois sur douze mois, ou encore le rôle de syndic bénévole de copropriété pour les agents propriétaires, ne nécessitent pas d’autorisation préalable. En revanche, toute activité de conseil, d’expertise ou d’enseignement doit faire l’objet d’une demande spécifique. Un agent nouvellement recruté peut continuer à exercer une activité de dirigeant de société pendant un an, renouvelable une fois, à condition de le déclarer à son administration. Cette souplesse permet de faciliter la transition entre le secteur privé et la fonction publique. Les fonctionnaires occupant un emploi à temps incomplet, c’est-à-dire inférieur à vingt-quatre heures trente par semaine, peuvent exercer une autre activité professionnelle rémunérée dans le secteur privé après simple déclaration.
Les sanctions encourues en cas de non-respect des obligations déontologiques
Le non-respect des règles de cumul et de déontologie expose le fonctionnaire à des sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’à la révocation, ainsi qu’à des poursuites pénales. L’article 432-12 du Code pénal prévoit des peines allant jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et cinq cent mille euros d’amende en cas de prise illégale d’intérêts. Ces dispositions visent à sanctionner tout agent qui prend ou conserve un intérêt dans une entreprise ou une société dont il a la charge d’assurer la surveillance, l’administration ou la liquidation. Les risques sont donc considérables et justifient une vigilance extrême dans l’appréciation de la compatibilité entre les fonctions publiques et les engagements privés. Par ailleurs, le fonctionnaire qui perçoit des dividendes sans autorisation ou qui exerce des fonctions de gestion alors qu’il n’y est pas autorisé s’expose à des sanctions administratives immédiates. La commission de déontologie peut également émettre des avis défavorables qui conduisent à l’interdiction pure et simple de l’activité envisagée. En cas de doute, il est fortement recommandé de consulter le service des ressources humaines ou un conseiller juridique spécialisé avant de s’engager dans une société. La transparence et la bonne foi constituent les meilleures garanties pour concilier responsabilités professionnelles et aspirations entrepreneuriales.